« J’aime bien être avec Céline, c’est facile. Elle m’apprend pleins de trucs. Là c’est un champ de betteraves, là c’est un champ d’autre chose, tu vois. » Jérémy est déprimé, comme on l’est tous à un moment ou un autre de notre vie, quand la vacuité et l’inutilité de notre existence nous aveugle, et que l’on n’a pas les moyens, à ce moment-là, de voir au-delà. A quel moment a-t-on enfin le droit d’être heureux ? Pleinement, sans arrière-pensée relativiste et analytique ? Les maisons en briques défilent, au volant de la Volvo. Un paysage gris, morne et triste, touchant et fidèle à nos espérances. Confortablement installés, Mimosa dans le juke-box, un McDo sur les genoux. Notre vie n’a jamais été aussi rock n roll. Je suis bien, et ça ne sert à rien de parler. Souvent, dès que l’on parle, on se rend compte que ce que l’on tenait pour évident ne l’est pas, que l’harmonie n’existe pas. De tous les instants paisibles de ma vie, combien de mots ont-ils été prononcés ? Marcher dans la campagne anglaise avec Michelle, arpenter les rues de Berlin la nuit avec Marit, regarder le ciel avec Nina, tous ces moments où l’on croise le regard de l’autre, et où l’on comprend qu’il vaut mieux ne rien dire, où sinon l’évidence de notre altérité, de notre erreur de jugement, nous saute à la figure. A quoi bon vouloir éclaircir ce qui nous échappe ? Nous avons chacun notre propre langage, nos propres références, que l’on croit comprises de tous mais qui ne le sont de personne. C’est évident et donc plus facile quand on ne parle pas la même langue, mais souvent oublié quand on est censée parler la même. Le pouvoir de fermer sa gueule n’est pas toujours évalué à sa juste valeur.
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