dimanche 13 mai 2012

Synesthète: dans tes rêves!

Mai 2009

"J'ai rêvé cette nuit qu'il y avait un rapport entre les nombres et la personnalité. Chaque odeur avait un nombre, et pouvait influencer un comportement. Les bons nombres étaient le 5 et le 13.Les méchants étaient le 6 et le 12. Mon parfum "Chance" portait une odeur 5."

Ca correspond à peu près aux couleurs que je sens en ce moment: couleurs chaudes pour les chiffres impairs (3 rouge, 5 jaune, 7 rouge), et couleurs froides pour les chiffres pairs (6 bleu turquoise, 8 bleu foncé ou violet selon le contexte chiffresque). C'est comme ça que je retiens les numéros de carte de cantine de tout le monde, enfin, ça aide. 7068, 7067: blanc, orange et rouge (couleur alsacienne?)
6276: très clairement bleu turquoise, couleur normande du nord (62, 76)
6277: hybride entre le chaud et le froid, turquoise et rouge.

Voilà, maintenant vous pouvez aller manger à l'oeil au restaurant Inter-Entreprise de la rue de Tolbiac!
Je mets ces textes entre guillemets, car ils ne sont pas de moi, mais de la personne que j'étais en 2008. Cependant, beaucoup de ces choses que j'ai écrites à l'époque ont encore un sens pour moi aujourd'hui. Désolée pour ces pavés indigestes, mais j'ai de l'affection pour la personne qui les a écrits, qui, insomniaque, devait écrire ça fébrilement sur un bout de papier afin d'expier et d'enfin trouver le sommeil, par nécessité absolue. Ces textes se trouvaient parmi des affaires ramenées des USA.

Novembre 2008, à quelques jours d'intervalles.

"Today is a day of change. I want to make something of my life, to create love and happiness. It's not me speaking. Universal positive energy through beins. I want to overcome sorrow, pain, cruelty, and all the forms of energy expressed in a negative way. I want to love you. Terrestrial life, external life might be miserabl in any respect, but I want to keep the fire from within burning. Our energy can be as constructive as destructive it proved to be many times. And I want to maintain and use the energy in a positive way. From now on, I decide to follow the light path instead of sorrow, complain and heaviness. Some things can be chose. Love is everywhere, sometimes next to cruelty. I have to find and turn on love everywhere I can, and if I can't, try to make people want the same. Stop destruction, let's create!"

Ok, j'avais peut-être un peu abusé du lsd. Et quelques jours plus tard:

"Ai-je le droit de dire que je suis malheureuse? Que je suis désespérée? J'ai deux impressions contradictoires. Parfois, je me dis que les moments de bonheur ne sont que d'intenses et brèves phases d'excitation qui jaillissent d'un océan de désespoir. Si j'attrape un espoir, je tire sur la corde jusqu'à ce que tout s'effondre: il était infondé, retour à la case départ. In cessante impression de tourner en rond et de ne faire qu'attendre la mort en essayant de vivre. La réflexion qui toujours accompagne cette première est que je suis heureuse, maintenant, tout de suite, et que je l'ai toujours été! Mes pleurs et ma morosité ne sont que le signe d'une faiblesse de caractère, d'une enfance trop gâtée. Autre variante: tout le monde est comme moi, sauf que j'ai la particularité de pleurer plus que la moyenne, par nature. You cannot control your mind, diraient certains détracteurs, philosophes et autres yogis. Eh bien non, definitely I cannot. Je suis déjà occupée à essayer de contrôler mon corps, et j'ai bien assez d'une prison. Par cela, je n'entends pas que que le corps (ou l'esprit) soit une prison, mais que la volonté infinie de le contrôler l'est. Autre variante encore: je suis inadaptée. Dans quel sens? Pourquoi? Pour quoi? Dans le sens où je ne suis bien nulle part, même -et c'est dur à dire, avec Lola, et c'est-à-dire avec moi-même en fait. Admettons que ce ne soit pas l'orgueil et l'égoïsme qui me rendent en permanence mal. C'est quoi alors, un caractère pessimiste peut-être?
Il n'y aucun élément de ma vie sur Terre qui puisse mener à de quelconques perturbations psychologiques. Au contraire, j'ai eu tout ce qu'il fallait pour être heureuse. Je devrais être heureuse, mais je ne le suis pas et me sens tellement coupable. Là encore, je me dis que personne ne l'est, d'où aucun espoir que je le sois un jour. Ou alors j'ai des prédispositions de caractère qui m'empêchent de voir le bon côté des choses (le "secret" du bonheur). C'est dur à changer, un caractère. D'ailleurs, je n'ai pas forcément envie de le changer, car c'est moi qui choisit d'être malheureuse. Avec tout ça, je mérite donc de l'être!Conclusion, reste dans ta merde, c'est entièrement ta faute.
L'impression que j'ai de mon expérience de vie: une continuelle déception. Jour après jour, je suis déçue. Par toutes les nouvelles choses que je fais, les personnes à qui je parle. Je cherche un modèle alors qu'il n'y en a pas. Et je traduis cette déception par deux attitudes: repli sur moi-même, ou bien agressivité vis-à-vis des "liens avec le monde" (personnes proches), qui ont pour point commun un dégoût croissant de moi-même.
A la lecture du livre (nda: livre de J. Siaud-Machin sur les gens """surdoués""", lu à cette période), j'ai cru trouver une réponse: je serais donc un zèbre! Hélas, tout me prouve le contraire: 1) je ne comprends rien à rien, 2) je suis nulle en maths. Je déteste les maths. Je les trouve moches, inutiles et absurdes. Je préfère la poésie et la danse. Quant à mes aptitudes du côté verbal, elles viennent tout droit de mon milieu ultra-favorisé. Je n'ai aucun mérite. Je suis normale. J'ai envie de mourir. Pas le passage de la vie à la mort, qui m'obsède car j'en ai très peur, ça m'obsède, tout le temps, je suis très angoissée.
J'ai plusieurs questions auxquelles je n'ai pas de réponse: pourquoi est-ce que je pleure tout le temps? pourquoi ai-je à la fois envie et si peur de mourir? pourquoi ai-je toujours l'impression que personne ne m'aime. Pourtant, une fois de plus je suis contradictoire car je pense que l'amour n'existe pas, ou alors il est extrêmement rare. Dans la réalité commune, personne n'aime totalement personne.
Tant d'incertitudes me rongent de l'intérieur. Dépendre de la parole d'autrui pour connaître leurs pensées. Quelle trahison! Le mensonge est partout! Quand je dis "je t'aime", je mens aussi. Les gens font semblant, mais je ne leur en veux pas. Mais alors pourquoi est-ce que je m'en veux à moi. Malheureusement, je crois que personne ne pourra jamais m'aider. Je suis condamnée à l'angoisse et aux pleurs. Condamnées par moi-même.

Je pourrais continuer longtemps comme ça, mais ça suffit (nda: effectivement)."

Une semaine après, dans un élan d'amour pour André, je partais à Prague sur un coup de tête.
Je suis amenée ces jours-ci à remonter le fil du temps. Je l'exaspère car je ne range pas assez vite, mais chaque petit carnet, petit papier habilement caché afin que personne ne le lise jamais, découvert au hasard dans un livre, une poche de sac à dos, une boîte à chaussures, m'amène à dérouler petit à petit l'écheveau de mon existence, à essayer de comprendre qui je suis. Des pensées enfouies que je compulse maladivement sur ce blog, non que ça intéresse quelqu'un, ou que je veuille que ce soit lu. Mais par peur d'oublier et, peut-être, dans un espoir très hypothétique que cela puisse parvenir un jour à quelqu'un qui pourra se dire: "je ne suis pas seul(e)".

samedi 12 mai 2012

Fun Radio

Je suis accro à Fun Radio, à ces chansons entêtantes diffusées 3 fois par heure, toujours les mêmes, qui rythment mes journées de façon cyclique. Toutes ces Inna, Cascada, Rihanna, poupées siliconnées et pourtant tellement touchantes. J'ai été séduite par Romain car il aime Inna, encore une bonne raison. Je n'aurais pas dû l'attendre pour aller la voir au Macumba de Saint-Julien-en Genevois l'année dernière. Le Macumba, plus grosse boîte de France, avec sa salle aux 7 miroirs et autant de dancefloors différents. Le rêve de toute une vie.Ces chansons qui me touchent, me mettent dans un état second, ou se superposent des rythmes réguliers, une voix divine, et des paroles simples, répétitives, et porteuses du sens que l'on choisit de leur accorder. "Where have you been, all my life", "I'm just playing, right here, right now", "Give me a chance to be into your life", où les femmes sont éternellement des victimes dans l'attente d'un homme viril qui les arrache à leur condition.
C'est horrible de toujours vivre dans l'attente de quelque chose, une attente abyssale et jamais satisfaite. Comment font les personnes qui se suffisent à elles-mêmes? Est-ce que certaines sont nées avec une case en moins, une âme incomplète? Et donc elles cherchent, inlassablement, ce petit morceau d'elles-même qu'elles ne pourront jamais trouver, qui ne conviendra jamais parfaitement, qui ne sera qu'un ersatz, un patch, un pansement à fleurs sur une blessure purulente, et elles souffriront toutes leur vie car elles ne peuvent pas se guérir elles-même. On croit trouver, et à chaque fois c'est un mensonge.

samedi 5 mai 2012

Remontons un peu plus loin encore. Ce n'est pas une chanson, mais trois, d'un même album. Une veste en jean, un sac, et un billet d'avion.

Mai 2007

Un soir de mai, il fait chaud, c'est l'anniversaire d'Emilio. Je l'ai vu, il a pris du lsd, il se prend pour une fleur, je m'ennuie, j'ai peur, j'ai pris la mauvaise voie, Eric m'aime trop, je me déteste, j'ai envie de mourir, Claire est bourrée, elle se fait plus ou moins violer dans un fossé, il est 20h et je suis saoule, et le pire c'est que j'aime ça. Il est là, il va venir. Il vient, avec sa copine. Je dois me cacher pour pleurer, et qui me console, c'est Eric, quelle cruauté, quel être immonde je fais, je ne mérite pas son amour. Eric part, Claire a disparu et tout le monde s'en fout, elle ressurgira au petit main avec des griffures partout, "tout va bien", Claire ne va pas bien et tout le monde s'en fout, car c'est Claire. André est là, je suis bourrée, j'ai mon jean blanc, des sandales compensée, mon haut bleu, et j'ai même pas de soutif, je suis une grosse pute et je me dégoûte, mais je suis bourrée donc c'est pas grave. André me parle toute la nuit, je ne comprends rien, ou je ne me souviens de rien, on boit de la cachaça avec du sucre, à même la bouteille, tout ce qu'il dit, c'est que je suis belle, et ça me suffit pour le suivre dans sa chambre. A cinq heures du matin, car il pleut et que je suis belle. Je passe l'agreg mais je m'en fous, ma vie n'a aucun sens mais je m'en fous, il me propose de venir en Tchéquie, et évidemment je dis oui. Il me donne du lsd et évidemment je dis oui.

La première fois à Olomouc, le premier trajet centre-ville/fakultni nemocnice, on traverse l'hôpital, il fait nuit, très sombre, j'ai peur, et s'il me tuait là? "Un petit peu d'urban bohemia", dit-il pour me rassurer. Qu'est-ce que je serais prête à donner pour retourner à Olomouc, cette nuit-là, avec sa main dans la mienne, la veste en jean, et la chaufferie de l'hôpital qui recrache sa fumée blanche dans la nuit d'été?

http://www.youtube.com/watch?v=U0B9myYLySc&feature=related
http://www.youtube.com/watch?v=AO1hGoOefYQ&feature=relatedhttp://www.youtube.com/watch?v=AeAB00szD4E
http://www.youtube.com/watch?v=gZsLP9oNdeo&feature=related

Take me away

Bon, décidément, je suis d'humeur en ce moment, à retracer ma vie en chansons. Comme les longueurs à la piscine. 1 longueur = 1 an, comment j'étais à 14 ans et demi? comment ça sera à 33 longueurs?

An immense tune, comme ils disent, en tout cas une chanson qui m'aura bercée pendant un an, quand ça allait bien quand ça allait mal, et qui encore aujourd'hui peut arriver à me hérisser quelques poils, bien qu'elle appartienne déjà au passé. Sans oublier que le mec de gauche est sacrément mignon. Bon, un soir, il pleut, je suis à Londres, j'ai  ma veste violette, et là, je le vois, à l'abribus, une canette de bière à la main, il me sourit, je prends le bus avec lui, il n'y a pas grand monde, il me prend la main, et je ne la lâche plus. Voilà, cette chanson, le mec de gauche, ma vie en Angleterre. Le dance floor, les basses qui font tout vibrer, même les verres sur le comptoir, mon sac à franges sur un sol poisseux, mes baskets à fleurs, les néons dans la figure, la solitude, la peur, et tous ces gens autour de moi qui ressentent la même chose mais ne le savent pas toujours, le froid, l'humidité, la bière, l'accent londonien, et les basses encore, qui tapent, qui nous donnent un rythme sur lequel on peut vivre. Malheureusement, la seule personne qui peut me taker away, c'est moi-même j'en ai peur.

http://www.youtube.com/watch?v=i46IN3h9dHk


Le Monde

Y a-t-il un profil type de l'anorexique?
Elle est perfectionniste, mal à l'aise dans les relations sociales, très performante sur le plan scolaire et dans l'excès. Elle cherche toujours à être la meilleure, la première de la classe. Elle ne s'aime pas mais a énormément besoin de l'amour des autres, de ses parents, de ses amis et de ses professeurs. L'anorexie est une maladie d'amour.
Une fois de plus, je voulais changer de vie, partir le plus loin possible, à la poursuite de quelque chose qui ne pourra exister que lorsque j'aurais accepté l'idée que ça n'existe pas. J'ai pris la solution la plus radicale qui soit, je suis retournée vivre chez mes parents. Je suis entourée de ses affaires, ses livres (dont il ne veut plus), ses affaires (qu'il me laisse, tout ça c'est du passé), les tee-shirts qu'il m'a offerts, le tee-shirt que je lui ai volé. Tout cela n'a plus aucun sens, ce ne sont plus que des objets, vides de leur substance.
Il n'a pas changé. Les mêmes cheveux, le même t-shirt, le même air absent et moqueur à la fois. "Tu sais, nous deux, pour moi, c'est du passé, c'est fini". J'ai son odeur dans la tête et je ne sais pas quoi en faire.

2009
Une soirée d'hiver, ou d'été, je ne sais plus. Une soirée, comme les autres, on fait le trajet à pied de Fakultni nemocnice jusqu'au centre-ville, sans savoir où aller. Au hasard, ce sera Vertigo. Un bar crasseux qui pue la clope, en entrant on passe devant les toilettes, la porte ne ferme pas, il n'y pas de papier. Ce même bar où lui et ses amis se sont fait casser la gueule par des skinheads, car il leur avait fait un bras d'honneur. Le bar est plutôt vide. Ca doit être l'été, il n'y a personne que nous connaissions. André roule un joint. Un grand écran est déployé, ça doit être un dimanche soir. Ils passent des clips. André, moi, et Radiohead. Je ne sais pas combien de temps ça dure, mais ça me semble une éternité. J'aimerais que ça s'arrête, qu'on reste toute la vie comme ça. Lui, moi, le joint, la chanson, le joint, le clip, moi, lui. Pour une fois, je m'en fiche de puer, je m'en fiche qu'il se foute les doigts dans le nez, je m'en fiche de rien comprendre, mais j'ai envie de mourir ici afin d'y rester pour toujours.

http://www.youtube.com/watch?v=nPX3u0XJzKM

2012
Je vais à la Cantada, un bar gothique près d'Oberkampf. C'est soirée karaoké. Il y a Lella et son pull jaune, comme une bouée de sauvetage, Erwan qui ressemble à mon cousin, et beaucoup de gens chevelus qui crient avec une bière dans chaque main. Et là, la chanson. Je n'entends plus rien, je ne vois plus rien. Et son odeur me submerge, son odeur, l'odeur du bar, l'odeur du joint, l'odeur des toilettes qui ne ferment pas, et je ne peux rien y faire.

Il ne sent rien, il ne sent plus rien. Son cou est là mais il ne sent plus rien. Désormais, ça ne sera plus que dans ma tête.