dimanche 22 septembre 2013

Ode aux bêtes de la nuit



J’ai l’esprit largement occupé à révolutionner la science mais pas que. Un autre problème  me taraude en cette troisième tranche de septembre : l’invasion de ma chambre par des Bêtes. Evidemment, c’est l’un des inconvénients de vivre à la campagne. On a les mouettes, le grand air, le Leclerc du samedi matin, mais il y a aussi des beïtes. Ca, Laetitia ne m’en avait pas parlé, décidant probablement dans l’ombre avec un rictus intérieur pervers que je découvrirais bien la vie par moi-même. Chaque soir à la nuit tombée, je scrute de mon oreille alerte, et de mon œil un peu moins alerte. Ils commencent à virevolter devant mon écran, malgré le diffuseur anti-moustiques presque vide (ça peut mettre le feu à la maison ?) que j’ai pris soin de brancher. Saloperie de diffuseur 100% naturel.  Apres réflexion quant à l’arme du crime (serviette ? magazine ? carte top 25 de Quiberon ? paquet de copies ?) j’opte pour la serviette, qui a l’avantage de rabattre le cadavre de la victime vers le sol au lieu de l’aplatir grossièrement sur le mur. Malheureusement,  le moustique est souvent plus rapide que moi. On croit l’avoir, car il disparaît, mais en fait non. Règle numéro 1 : chercher le cadavre. J’arpente les rainures du parquet à quatre pattes mais je ne vois rien (enfin, si, je vois beaucoup de choses que j’aurais préféré ne pas voir, mais pas de cadavre de moustique), et pendant ce temps, il est sûrement déjà en train de me piquer les fesses.
Finalement, je décide de renoncer et d’aller me coucher sur ma mezzanine. J’adopte la technique de la chèvre : allumer ma petite lampe en haut pour attirer les beïtes et ainsi mieux les tuer. Sauf que, dans mon monde merveilleux, il n’y a que les moustiques que je tue, et c’est justement ceux que je n’arrive pas à avoir. Quelle ironie. Je lis tranquillement quand soudain, tout à coup (et c’est là où on se rend compte que la chèvre se fait souvent bouffer), un éclair sombre passe subrepticement sur ma droite. Je bondis (« jaillis » serait un mot plus exact) hors de la couette pour chercher mes lunettes, que je manque de faire tomber à l’occasion, et là j’aperçois l’Horreur : une monstrueuse araignée velue, oui, velue, tranquillement à dix centimètres de mon oreille. « Et qui sait ce qui se passe une fois la lumière éteinte ». Malheur, car ça, les araignées, je ne tue pas. C’est contre ma philosophie de vie (« aimons-nous les uns les autres, sauf les moustiques qui cherchent la merde »), et puis aussi, c’est trop gros. Je commence par essayer de lui parler, tout en saisissant un prospectus ikea, pour la faire délicatement monter dessus. Mon plan initial est donc, plutôt que de faire une bouillie immonde d’araignée velue sur mon lieu de repos et d’innocence, de la balancer par-dessus la mezzanine avec le catalogue Ikea et « elle trouvera bien le chemin de la sortie toute seule ». Puis je réfléchis que le matin, quand je chercherai, mal endormie et peu réveillée, une paire de chaussette pour aller me faire griller des toasts, savoir qu’une araignée énorme immonde et velue et sûrement pleine d’œufs d’araignée m’attend tapie dans le tas de vêtements disposé sous la mezzanine (mais très bien organisé par strates chronologiques), ça ne sera pas cool. Je décide donc plutôt d’essayer de pousser madame le long du mur jusqu’à une « safe zone » aussi bien pour elle que pour moi, mais elle renâcle et se blottit dans le coin du plafond pile au-dessus de mon oreille gauche. Elle ne bouge pas, je ne bouge pas. Je commence à l’insulter. Aux moustiques je dis « mais putain sale pute laisse-moi te tuer tranquillement » mais elle, elle sentirait le tressaillement dans ma voix. Et là, elle se dirige tranquillement vers mon lit. Trop c’est trop, je panique, et je saisis Psychologies Magazine (j'ai hésité quelques centièmes de seconde avec Windsurf Magazine). Je frappe un coup sec. Ca y est, c’est fini. Son estomac gît sur le mur, et son corps recroquevillé est tombé, transparent et cadavérique, à quelques centimètres de mon oreiller. C’est répugnant. Je prends un vieux mouchoir pour essuyer l’estomac et camoufler le corps. Qui remue encore. J’appuie bien, je me dis qu’autant passer la barrière et tuer, autant le faire à fond. Affaire close. Trois minutes après, je me dis que ça serait peut-être une bonne idée de descendre jeter le mouchoir avant que, dans le noir à tâtons, je me mouche dedans. Je descends et je le jette. Bon, cette fois, c’est bon « on est tranquille ». Le moustique revient à l’attaque et je lui dis toi sale pute tu vas prendre cher, et je l’explose entre mes deux mains, tac, un crime parfait, le cadavre qui tombe tout propre sans coller ni rien. Super jouissif. Prête à affronter le noir, j’éteins, et me recroqueville. Je fais moins la maligne. Je mets mes boules quiès pour ne rien entendre, et je pense à Elena et Baptiste qui entendait des choses calvacader dans le mur à Ste-V., et du film qu’on en ferait (« La nuit des fouines ») et de son sequel (« L’aube des fouines ») puis de son prequel («  Le crépuscule des fouines »). Parfois, j'écoute le silence pendant de longues minutes, hyper concentrée, croyant entendre des bourdonnements de moustiques, ou des bruits d'araignées velues qui tissent leur toile dans mes chaussures, mais en fait c'est juste la chasse d'eau. Tout cela est épuisant.

lundi 25 mars 2013

Archive ZC 1 (janvier 2013)



Le plus beau slow de tous les temps. Vous ne le croirez pas, mais je n’ai jamais dansé de slow. Je ne comprends pas, car je suis pourtant une incurable romantique. Pendant cinq ans, j’ai gardé dans mon portefeuille la photo de ce mec, dont j’ai oublié le prénom, et à qui je n’ai jamais adressé la parole. Il était blond, il venait de Lille. Il faisait du roller, alors je me suis mise au roller, en cachette. Mais bon, c’était le bg de la colo, il avait 16 ans, j’en avais 18, « c’était impossible ». Ok, c’était y’a presque dix ans, mais je n’ai pas changé. Après la thèse, je crois toujours qu’un beau tchèque va m’emmener sur son cheval blanc pour aller ouvrir un surf-shop aux Maldives. Le problème, c’est que j’y crois vraiment.

lundi 5 novembre 2012

L'océan

Mes mains sentent le falafel, elles poissent, elles me dégoûtent. Mes aisselles sentent la sueur. Mes cheveux gras pèsent sur mon crâne. Ma peau me démange de l’intérieur. Mon dos ne tient pas en place. Mes fesses n’en peuvent plus d’être assises. J’aimerais être ailleurs, mais nulle part en particulier. Je voudrais fuir ce corps, m’évader par un trou de nez et partir en fumée dans l’air, me mêler aux gouttes de pluie, redescendre violemment sur le bitume, exploser en 10 000 gouttelettes, ruisseler dans un caniveau, à travers une bouche d’égoût, contourner un rat en décomposition et lécher ses flancs rêches et froids aux poils ratatinés, poursuivre dans les fissures d’une nappe phréatique, et finir ma course dans un océan, au milieu de l’immensité, diluée, éternelle, immanente.

Je lis et je relis ce que je suis censée apprendre aux étudiants. Je n’y comprends rien et pourtant c’est moi qui l’ait écrit. Mon odeur et le contact du gras sur mes mains et ma tête m’empêchent de me concentrer, sans compter l’insoutenable chaleur moite et pauvre en oxygène de cette bibliothèque. Je n’arrive pas à trouver le repos. Le contact de mes cuisses sur la chaise m’horripile, alors je me sens obligée de serrer les fesses régulièrement afin de minimiser ce contact. Les larmes me montent aux yeux aussi facilement que j’aimerais m’extraire de ce corps et de cet esprit gênants et n’être qu’une molécule insignifiante. Ce que je suis, bien sûr, une molécule insignifiante de la fractale de l’univers. Mais j’aimerais en être l’élément le plus petit, le plus unique, la forme primitive.

Je traverse la bibliothèque comme un zombie; les jambes des filles, les voix, les odeurs, les paroles, les rires, tout m'agresse. Je dévie de mon chemin pour les éviter. Je n'ose pas les regarder dans les yeux, j'ai envie de pleurer de dégoût, sur moi-même (bien sûr car je ne pense qu'à moi-même). J'ai l'impression que mon mal-être physique suinte par tous les pores de ma peau, même si je sais que j'ai l'air normale. Et que si tous ces gens ont l'air normal, eux aussi suitent probablement leur propre mal-être. Ou pas? J'arrive vers Romain, je n'en peux plus, je suis obligée de lui chuchoter, de lui demander si lui aussi rêve de prendre un couteau et de s'ouvrir la peau en deux, de haut en bas, de laisser ses organes se répandre sur le sol et de tout brûler. Il rigole en disant "non".

Fumer m’apaiserait. Mais je ne veux pas fumer. Je ne veux rien. Rien, rien désespérément rien. Ou alors, si, valdinguer toutes mes affaires par la fenêtre, et courir pieds nus sous la pluie, avec des personnes qui partageraient la même chose que moi. Je n’en peux plus des gens, de ne pas pouvoir être eux, de ne pas pouvoir contrôler leur pensée, de ne pas pouvoir m’unir spirituellement. « Je n’arrive pas à accepter l’altérité ». J’aimerais être l’Etre unique. J’aimerais que tous coulent en moi, et je pourrais ainsi me liquéfier et me répandre tranquillement. J’aimerais juste être, mais je n’y arrive pas. J’aimerais être une feuille, et tomber. Mourir est impossible, même si vivre m’emmerde. Alors j’attends patiemment la fin du monde, que j’espère ardemment pour dans quelques semaines. On mourrait tous ensemble et on vivrait enfin une expérience de communion universelle, tous les égos et tous les cerveaux seraient dissous.   Le seul intérêt que je vois à ma vie est la drogue, et la douce sensation de me dissoudre enfin qu’elle procure. Avec elle, je ne vis plus, mais je suis tout simplement, je suis l’air, le son, la terre. Je peux m’allonger dans la terre et être la terre. Je peux me laisser porter par les vibrations sans avoir à me préoccuper de vivre. Comme disait ma grande amie et philosophe germanophone Marit, la musique te donne un rythme sur lequel vivre, et alors tu n’as plus qu’à te laisser porter. Entre la méditation et la drogue, mon choix est vite fait. Je veux tout, tout de suite. Je suis une consommatrice, une princesse, et un vieux torchon insignifiant à la fois.



vendredi 19 octobre 2012

Pot pourri 2

Quand j’étais petite, je voulais sauver le monde. Je voulais sauver les enfants qui n’avaient pas eu ma chance. Je me sentais coupable. Je voulais prendre leur place dans les bordels de Patpong, je voulais qu’on brûle des cigarettes sur ma peau, qu’on m’enferme dans un placard sans rien à manger, et alors j’aurais eu le droit de me plaindre, et j’aurais pu tirer du plaisir à ma situation de martyr. J’aurais été un enfant lâche, un enfant qui se fait gazer sans rien dire, la petite main tremblotante dans celle de sa mère, un enfant qui n’ose pas s’échapper, qui mange, qui souffre et qui meurt quand on lui dit de le faire. J’aurais été un enfant obéissant. Quand j’étais petite, j’étais heureuse quand j’étais malheureuse, quand je poussais à bout mes parents afin qu’ils lèvent la main sur moi, quand je racontais que j’étais orpheline, quand je m’inventais des histoires d’inceste qui n’étaient pas les miennes. J’étais déjà un enfant pervers. Quand j’aurais été grande, j’aurais été médecin dans l’humanitaire, j’aurais ouvert un orphelinat pour les petites livrées à la prostitution, j’aurais été assistante sociale. Je lisais les témoignages d’enfants battus avec une avidité louche, voire malsaine. Je me détestais d’être l’enfant unique et gâtée de parents aimants et attentionnés. Je voulais souffrir, sans savoir vraiment savoir ce que ça voulait dire, en prenant la souffrance des autres. Je voulais être du côté des faibles et des opprimés forts dans le cœur, tout le contraire de moi en somme. Je voulais être des leurs.

Pot-pourri

Puisque l'humeur est à la ponte, puisqu'il est vendredi soir et que demain j'ai pas école, puisque j'ai bien mieux à faire, puisque j'ai un problème de lobe frontal et que je veux faire comme vous, j'ai décidé que c'était mon tour de pondre un oeuf. Pas un oeuf de poule, un bel oeuf beige, propre et brillant. Un oeuf d'oiseau merdique, un oeuf de pigeon ? avec la plume qui colle encore à cause du caca collé dessus, un oeuf que personne ne voit et qu'un renard va bouffer sans y penser. Certes, c'est étrange pour un chat, pondre un oeuf, me direz-vous. Mais la nature est pleine de surprise.

Je ne me sens pas proche de vous. Je ne me sens ni incomprise ni supérieure ni entourée de teubés incompétents. C'est plutôt exactement l'inverse. Je ne comprends pas l'autre. Je crois l'empather, alors que je m'empâte dans des mdd grossiers qui, comme leur nom l'indique, ont pour but de me protéger de la vérité: mon auto-aveuglement de compassion n'est qu'un vernis ridicule sous le monstre palpitant de l'égocentrime extrême qui patiente en-dessous, et qui est malheureusement notre lot à tous. Je ne suis pas supérieure. Ma vie n'est qu'une vaste supercherie. Vous réussissez “par erreur”, en brillant tdahiens qui préfèrent sauter de toit en toit, racler les égoûts ou traîner dans les bars à pute le whisky dans une main et le désenchantement dans l'autre, au lieu de travailler. Et pendant ce temps, pendant que vous vous roulez dans la fange de l'ennui avec désespoir et mal de vivre, je note mes petites fiches, je fais mes exercices, je me lève à 8h et je prends ma douche, je fais ce qu'on me demande, petite fourmi servile, vaillant petit soldat du bonheur de la tâche accomplie. Je ne bois pas car ça fait grossir. Je ne fume pas car ça donne des rides. Et qui voudrait encore de moi, alors? Je fais des études brillantes et je me demande souvent comment ça serait si j'avais juste fait des études bien. Je suis capable de reproduire de la merde joliment enrobée sur des pages et des pages et ça passe comme une lettre à la poste. Je suis capable de débiter des âneries entrecoupée de blagues sur le petit Gregory à des étudiants qui mettent leur vie entre mes mains, scrutée par des regards endormis, ou, au mieux, incrédules. Je suis capable de dire merci quand on me félicite pour la énième fois pour mon sérieux, qui n'a pourtant rien du talent. A chaque fois j'ai envie de hurler “mais au secours, ça ne peut pas être ça, connard d'enculé, toi aussi tu fais semblant d'y croire quand tu me dis que c'est bien, car sinon ça serait avouer que toi aussi tu es bâti sur un château de cartes de mensonges et d'auto-illusions, aie au moins les couilles de me le dire au lieu de me mettre la main sur l'épaule”. Mais je ne partirai pas. Car on m'aime quand on croit que je travaille bien, et c'est le principal. Je ne suis pas entourée de teubés. Je suis une sorte d'ovni provocateur frustré incandescent mais aussi froid et coupant comme la glace. J'ai mis mes oeillères et je fonce tout droit, tête baissée, et je ne regarde pas qui suit, et de toute façon ça ne m'intéresse pas. Je fais semblant de faire ce qu'on me dit, et qui me soupçonnerait, moi, la gentille sérieuse sur qui on peut compter? J'aurais été un bon nazi. J'aurais surveillé les 110 000km de voies ferrées françaises jour et nuit et houspillé les 482 aiguilleurs pour qu'ils soient à leur poste à cinq heures du matin. J'aurais marché droit et loin, du moment qu'on m'aurait donné des médailles et une tape sur l'épaule. Ouais ok, nazi ça veut pas dire ça, mais au secours, osef. Mais j'aurais aussi été un mauvais nazi (comment savoir lequel des deux l'emporte?) car je n'y aurais pas cru dur comme fer. J'aurais été consciente de faire le boulot pour la médaille, j'aurais été sincèrement désolée pour tous ces enfants juifs qui mourraientt d'une asphyxie lente et douloureuse. Mais allez, après tout, comment savoir? Ne jugeons pas trop vite.
Ma vie ne part pas en couilles. J'ai un boulot, un appart, I walk the line. Je ne suis pas rock n'roll. Je fais tout à moitié. Je fume à moitié, je baise à moitié, je ne suis même qu'à moitié anorexique, à moitié pseudo-lesbienne, qu'à moitié drôle et qu'à moitié déprimée, qu' à moitié jolie. Je conduis à 138 sur l'autoroute. Même pas pour le genre. Mais parce que l'incongruité, la vanité et le néant de la prise de risque m'ennuient avant même d'y arriver. Ou alors c'est ce que j'essaie de me faire croire. Je ne suis accro à rien, ni à l'adrénaline, qui rend ses dépendants palpitants et chevaleresques de l'impossible, ni aux endorphines, qui font courir tous ces suceurs de joggeurs du dimanche, ni à la sérotonine des meufs pseudo-normales, (mais qui l'est?) qui bouffent du chocolat en cachette à trois heures du mat. Je peux me lever en plein après-midi, me planter devant un collègue-pseudo pote, et lui dire “s'il te plaît, tue-moi”, en faisant semblant au bout d'un dizième de secondes que c'est une blague, tout en gardant au fond de moi que c'est pas une blague, mais tout en sachant que si, c'en est une, car franchement qui a envie de souffrir et de crever sans savoir ce qu'il y a derrière?

Au secours, vous me dégoûtez tous avec votre mal-être poseur empathe incertain malheureux tristitude. Alors qu'on sait bien tous qu'au fond on est que des enculés égoïstes programmés pour survivre, et donc, logico-bio-médicalment, pour rabaisser et mépriser ceux qui nous sont inutiles. On est tous des connards. Mais parfois, j'ai juste du mal à l'assumer car “au secours je ne veux pas être encore eux”, mais c'est parce que j'ai pas encore voulu comprendre que je n'avais pas vraiment le choix. Même l'enfant africain qui crève de faim avec ses jouet fabriqués en bouchon de jerrican à essence balancés par les fenêtres des 4x4 rutilants des seigneurs du pétrole après qu'ils aient écrasé sa petite soeur, même lui c'est un connard. Enfin, je crois.

D'habitude je me dis que j'ai pas le droit de juger car “je n'ai pas souffert”, mes parents ne m'ont pas battue avec des fils électriques hors d'âge pour ensuite me vendre à un tenancier de bordel crasseux en faisant semblant de croire que c'était un marchand de tapis. Ca, c'est dans mon autre vie. Mais là j'ai envie de dire merde, de vous cracher à la gueule avec votre malheur, car au final on baigne tous dedans, bordel ou pas.

Allez, ce post vain n'appelle évidemment aucun commentaire, j'avais juste envie d'avoir l'impression de faire quelque chose “qui paraît sortir de l'ordinaire”, alors qu'en fait, bien sûr, il n'en sort pas. Tout a été dit, fait, pensé. Même Eratosthène en -200 c'était un bg trop balèze. Sans compter tous ceux que l'Histoire, dans son rouleau compresseur factice et injuste, ne retiendra pas.

Enfin, ne l'avais-je prédit à Brutus? “Dans deux semaines, je toucherai violemment le bas du sinus, car j'aurai terminé mes deadlines inutiles et vaines mais qui avaient le mérite de m'occuper”. Voilà, j'y suis, je ponds une bouse inutile, j'ai l'impression d'avoir fait quelque chose. Rien de nouveau sous le soleil. Que la roue continue de tourner, de toute façon ce n'est pas moi qui vais y changer quelque chose.

Amen mes frères et mes soeurs.

Cot cot codec

PS: Ah si, j'ai fait quelque chose d'utile cet été. J'ai porté haut les couleurs de la poulitude en amenant ma brave équipe (de boulets) à la victoire au son “d'à-tchic à-tchic -à tchic? Cot cot cot!”
Intrinsèquement, c'est ce dont je suis la plus fière, disons ces....huit derniers mois.

jeudi 19 juillet 2012

Anne-Claire

Je décide d’aller passer quelques jours à Prague, histoire de visiter. Je n’ai vu du pays jusqu’à présent que ses joyaux de province. J’ai réussi à ne voir de Prague que l’aéroport et le métro. Ariane m’a donné le numéro de sa copine Anne-Claire. Je décide de l’appeler, « pour voir », « pour tâter le terrain ». D’accord pour m’héberger. Anne-Claire, à la fois coiffeuse, artiste et étudiante en lettres-esthétique de la vague, vit toujours dans un flou bordélique permanent qui n’est pas sans charme. Je me retrouve à attendre dans un café pouilleux de Letna, avec ses copines expatriées, qu’elle rende sa chambre présentable. « Anne-Claire est très pudique avec ses affaires personnelles », « c’est normal elle est Scorpion », pensai-je. Anne-Claire est en train de couper les cheveux d’une amie, nous allons dormir dans le même lit. Elle demande, catastrophée, si quelqu’un n’aurait pas un peigne ou une brosse, c’est plus pratique pour couper des cheveux effectivement. Et là je sors le fameux peigne vert de mon sac. Celui que j’ai perdu depuis. Nos regards se croisent. « C’est parfait, c’est exactement ça ! » dit-elle sans vraiment oser y croire. Une amitié est née grâce à un peigne, grâce à un coup de téléphone, grâce à la lenteur du mois d'août en Bohême du sud. Et le lendemain nous courrons après un bus improbable dans le dédale des grands immeubles gris sur les hauteurs de Prague. « Dépêche-toi ! » elle me crie sans se retourner, « Qu’est-ce qu’il se passe ? » je ne cromprends rien. Et on a couru. Et là české Budějovice prend tout son sens.




Ceske Budejovice 3

Notre coordinatrice a du mal à me blairer, même si elle se force car «c’est quelqu’un de bien » et « elle se doit d’aimer tous les volontaires, après tout s’ils là, c’est qu’ils ont un bon fond » (mes propres conjectures). Elle nous répartit en petits groupes pour chaque tâche ; problème, j’ai envie de tout essayer. Je tonds la moitié de la pelouse, vais aider un peu machine au ciment, puis un peu bidule au crépi, je vaque, je reviens tondre un quart de pelouse. Je vois bien qu’elle bout et me lance des regards noirs, et je me demande juste quand elle va craquer. J’ai rarement ressenti véritablement l’hostilité de quelqu’un vis-à-vis de moi, au contraire d’une indifférence banale. Ca fait tout drôle de voir que l’on peut provoquer un sentiment aussi fort chez quelqu’un, c’est perturbant, touchant et presque beau. Enfin, c’est ce que j’aurais pensé si elle ne m’avait tellement insupportée, à non seulement être laide, mais en plus mauvaise et pas très très fut (ce qui fait de moi une langue de pute tout à fait assumée. A-t-on le droit d'insulter une scoute qui aide les autistes? J'ai presque l'impression de faire une blague nazie en ne l'aimant pas). Quand elle explose enfin (« il faut rester à la tâche assignée !!!! ») je suis presque soulagée et je lui obéis mollement, entre pitié et paresse pour discuter.
Enfin arrive la fin du séjour, la fin de l’ennui, du crépi et du français. A quoi aura servi ce séjour ? A rien, j’en suis intimement persuadée, en tout cas rien d’utile pour cette communauté de branleurs aussi humains que la moyenne, ni gentils, ni méchants, qui rêvent de se créer une vie meilleure ayant un but. Parfois, on ne comprend que plus tard.